L’Évangile de Matthieu
Le Notre Père – Partie III – Matthieu 6:13
Le chapitre 6 est le chapitre de la prière modèle, du Notre Père. Dans ce chapitre, Jésus-Christ va revenir sur des notions essentielles qui permettent de comprendre la véritable prière, celle qui se fait dans l’intimité de sa chambre, celle qui ne répète pas les mots, celle qui ne fait pas de bruit, celle où l’on entre en dialogue véritable avec le Père. On connaît tous le Notre Père. Beaucoup le récitent par automatisme sans comprendre sa portée spirituelle. Il est temps non plus de réciter le Notre Père, mais de déclamer cette prière avec le cœur dans l’attitude et l’état d’esprit qui plaît à Dieu.
Ainsi, après l’introduction sur l’enseignement de l’état d’esprit de celui qui entre en prière, Jésus-Christ donne un modèle de prière, le Notre Père, qui contient tout ce dont nous avons besoin pour notre vie spirituelle. Lors de nos deux précédentes études, nous avions vu les versets 9 à 12. Dans cette étude, nous allons nous pencher sur un unique verset, le verset 13, qui clôture la prière.
Rappelons que Matthieu adresse son évangile à des croyants qui connaissent les coutumes juives, et que son but est de montrer que Jésus est le Christ, le Messie annoncé par les prophéties. Il est certainement l’évangéliste qui fait le mieux comprendre que le Nouveau Testament est éclairé par l’Ancien Testament, lequel ne se comprend qu’à la lumière du Nouveau Testament.
Commençons par lire la prière dans son intégralité.
⁹Voici donc comment vous devez prier : Notre Père qui es aux cieux ! Que ton nom soit sanctifié ; ¹⁰que ton règne vienne ; que ta volonté soit faite sur la terre comme au ciel. ¹¹Donne-nous aujourd’hui notre pain quotidien ; ¹²pardonne-nous nos offenses, comme nous aussi nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés ; ¹³ne nous induis pas en tentation, mais délivre-nous du malin. Car c’est à toi qu’appartiennent, dans tous les siècles, le règne, la puissance et la gloire. Amen !
Matthieu 6:9-13, Traduction Louis Segond
Lors de l’étude précédente, nous avions coupé cette prière en trois parties, et cela uniquement dans le but que les articles ou les vidéos ne soient pas trop longs.
⇒ La première partie : les versets 9 et 10
⇒ La seconde partie : les versets 11 et 12
⇒ La troisième partie : le verset 13
Nous en sommes à la dernière partie, à l’étude du verset 13, et nous allons voir que ce seul verset contient énormément d’enseignement spirituel.
Relisons ce verset
ne nous induis pas en tentation, mais délivre-nous du malin. Car c’est à toi qu’appartiennent, dans tous les siècles, le règne, la puissance et la gloire. Amen !
La première chose qui choque dans cette lecture, c’est le fait que la traduction fait croire que Dieu puisse induire en tentation, c’est-à-dire que Dieu tente les hommes, et que ces derniers le supplient de ne pas le faire, de ne pas les tenter. C’est choquant. On a l’impression que l’on supplie Dieu de ne pas nous pousser au mal.
La TOB (Traduction Œcuménique de la Bible) donne cette traduction : « et ne nous conduis pas dans la tentation ». Et la Bible en français courant propose cette traduction : « et ne nous expose pas à la tentation ».
Dans notre langage courant, la tentation a une connotation très négative. La tentation est définie par le fait d’être excité par le désir ou l’envie, ou d’être poussé à enfreindre une loi morale ou divine. Donc, quand on parle de tentation, on a l’idée de quelque chose qui nous pousse à commettre le mal. Ainsi, est-ce que Dieu nous pousserait à mal agir ? Bien sûr que non, puisque Dieu ne veut pas le mal. Et pourtant, ces traductions françaises nous font croire que Dieu nous pousserait au mal. Et l’on va voir, encore une fois, que ce qu’on lit n’est pas forcément ce qui est écrit.

Prenons un exemple : lorsqu’on dit à quelqu’un « ne me dis pas cela », on utilise une négation relative, c’est-à-dire qu’on dit à quelqu’un de ne pas faire quelque chose, mais que ce quelqu’un peut ou ne pas écouter notre défense.

Ce nom masculin πειρασμός – peirasmos désigne une épreuve, une tentation, une expérience. En réalité, les Grecs ne font pas la différence entre la tentation et l’épreuve, c’est le même mot.
Le mot πειρασμός – peirasmos découle du verbe πειράζω – peirazo qui signifie essayer si une chose peut être faite, tenter, essayer, éprouver, éprouver malicieusement.
Dans ce verbe πειράζω – peirazo on y retrouve la racine πεῖρα – peira qui signifie une épreuve, une expérience, une tentative, la vérification d’une chose, apprendre à connaître par l’expérience, expérimenter. Dans ce mot, on y trouve l’idée d’aller au-delà, de l’autre côté.
Donc, si l’on résume, on ne supplie pas Dieu de ne pas nous induire en tentation. On demande à Dieu de nous aider à ne pas faire des expériences qui pourraient nous mener au-delà, de l’autre côté du chemin, qui pourraient nous nuire. On demande à Dieu de nous aider à ne pas tenter des choses qui pourraient nous nuire, à ne pas éprouver sa Parole en essayant des choses contraires à sa Parole et qui nourrissent les sens, donc l’ego.
Ainsi, on demande à Dieu de nous aider à résister à toutes ces choses tant convoitées par le monde, à résister à l’envie d’expérimenter des choses que l’on ne devrait pas expérimenter, par exemple, la drogue ou l’alcool, donc, à résister tout simplement à la mauvaise pensée qui est à l’intérieur de nous, l’ego, et qui nous pousse à réaliser des expériences destructrices, au-delà de nos limites, en nous poussant, par exemple, à vouloir nous élever à Dieu par nos propres moyens par la connaissance.
Beaucoup pensent pouvoir s’élever à Dieu par leurs propres moyens, en priant beaucoup, en étudiant beaucoup, en allant à l’office régulièrement, en jeûnant, en méditant… Alors que finalement, cette prière annonce que non, on ne s’élève pas à Dieu par nos propres moyens, on demande à Dieu son soutien pour ne pas faire de bêtises, car sans Dieu, on ne peut rien faire et c’est l’ego qui prend le dessus. Et c’est toujours Dieu qui nous élève à lui, qui nous « tire » du monde.
Ainsi, et pour conclure, ce n’est pas Dieu qui induit en tentation, comme le laisse supposer le texte. C’est au contraire une demande à Dieu de nous aider à lutter contre les mauvaises pensées qui naissent de l’ego et qui nous poussent à expérimenter des choses qui sont destructrices pour l’esprit, et cela dans tous les domaines de notre vie. Il y a des choses destructrices qui sont évidentes, comme expérimenter la drogue. D’autres qui le sont moins, comme le fait de vouloir s’élever à Dieu par ses propres moyens, ou vouloir chasser un démon par ses propres moyens, par des prières, parce qu’on pense qu’on a un don pour cela ou parce qu’on a reçu un enseignement sur l’exorcisme ou une ordination de prêtre-exorciste. D’ailleurs, comme le dit la suite de la prière, c’est Dieu qui délivre, non seulement du démon, et aussi de l’ego.
Ce qu’il faut comprendre, et c’est tout le sens véritable de ce « ne nous induis pas en tentation », c’est que cette petite phrase est en réalité une demande de protection. On demande à Dieu de nous aider à résister à notre ego, car on sait que Dieu est notre seul secours, et que sans Dieu, on est incapable de discerner les mauvaises pensées qui viennent de l’ego et qui sont alimentées par les mensonges du monde.

Ainsi, la délivrance est lorsque Dieu nous sauve, nous protège, nous défend contre le malin, nous préserve, nous observe avec soin pour éviter que l’on chute, nous écarte du malin, nous éloigne du malin. Cela change toute la vision de la délivrance, car, habituellement, lorsqu’on pense à la délivrance, on pense à un rituel de prières qui nous permettrait d’éloigner de nous le mal. C’est ce que l’on nous apprend lorsque l’on explique la délivrance. Or, non, c’est Dieu qui éloigne de nous le mal, et justement, on lui demande qu’Il nous éloigne du malin, et l’on verra qui est le malin.
Cependant, la conjugaison à la voix moyenne montre que c’est l’Esprit saint qui agit et nous délivre. Cette délivrance ne peut venir que de Dieu, et elle suppose donc que Dieu est souverain dans nos vies. Elle suppose l’acceptation de cette grâce qui est la délivrance, grâce qui est offerte à tous ceux qui reconnaissent Jésus-Christ comme leur Sauveur et Seigneur, et qui passe nécessairement par la repentance, c’est-à-dire par le dépouillement de son orgueil afin de voir en vérité son état de pécheur.

Cet adjectif πονηρός – poneros désigne ce qui me remplit de contrariétés et de privations, donc l’ego, et il désigne celui qui m’apporte des difficultés, celui qui me met en péril, celui qui est mauvais par nature, méchant. Donc, ce n’est pas le diable ou Satan. Il s’agit ici de l’ego, celui qui me pousse à la destruction, mon ennemi intérieur, et le mauvais, le méchant, l’ennemi extérieur, qui me fait du mal ou qui, par ses paroles, m’induit en erreur et me pousse dans une mauvaise direction, l’homme de mensonge.
Si l’on regarde du côté du Grand Bailly, qui est le dictionnaire de référence grec, le mot πονηρός – poneros signifie celui qui est dans la peine, celui qui souffre, celui qui est malheureux, l’infortuné, celui qui est en mauvais état, le mauvais, le méchant, le pervers, celui qui cause de la peine, de la fatigue.
Alors oui, certains commentateurs disent que ce mot se réfère probablement à Satan, que Jésus-Christ, par l’utilisation de ce mot, a voulu parler de Satan. Or, la Parole de Dieu est précise, et si Jésus-Christ avait voulu parler de Satan, il aurait utilisé le mot Satan pour le faire, et non le mot πονηρός – poneros. Alors, oui, certains diront que Jésus-Christ parlait en araméen, et que Matthieu a retranscrit en grec ces paroles de l’araméen, et donc, il aurait peut-être eu ici une confusion. Ce n’est pas possible, car Matthieu connaissait parfaitement et l’hébreu et l’araméen et le grec. Ajoutons à cela que son écrit est inspiré, c’est-à-dire soufflé par l’Esprit saint, il ne peut y avoir aucune erreur. Donc, ici, clairement, il ne s’agit absolument pas de Satan, mais de l’ego et des mauvais, des méchants.
Cette vérité change beaucoup de choses, notamment concernant l’exorcisme. On demande à Dieu de nous délivrer, c’est-à-dire de nous sauver, de nous éloigner, de nous protéger… de nos contrariétés, de nos privations, de nos mauvaises pensées qui engendrent des contrariétés et des privations, donc de notre ego, et l’on demande à Dieu de nous protéger, de nous éloigner, de nous sauver… des hommes méchants, des hommes de mensonge, des hypocrites qui induisent en erreur par leurs paroles.
Et cela rejoint les études concernant le psaume 1 qui donne une définition précise du méchant et de l’hypocrite, appelé moqueur dans le texte, et le psaume 5.
Car c’est à toi qu’appartiennent, dans tous les siècles, le règne, la puissance et la gloire. Amen
Cette fin de verset n’appartient pas au texte primitif, on ne retrouve pas cette dernière partie du verset 13 dans les plus anciens manuscrits. Il semble donc qu’il s’agisse d’un texte ajouté plus tardivement qui apparaît avec de nombreuses variantes dans certains manuscrits, et qui a été ajouté afin de donner un caractère plus solennel à la prière, notamment lorsqu’elle était lue en public.
Cependant, la grande question est : a-t-on besoin d’ajouter de la parole à la Parole de Dieu ? Certainement pas ! Absolument pas ! La Parole de Dieu se suffit à elle-même et y ajouter quelque chose c’est déformer cette Parole de vérité. Donc, on ne tiendra pas compte de ce dernier verset ni de ce « amen » qui clôture la prière.
Que Dieu vous garde et vous bénisse.

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