L’Évangile de Matthieu
Le pardon de Dieu – Matthieu 6:14-15
Le chapitre 6 est le chapitre de la prière modèle, du Notre Père. Dans ce chapitre, Jésus-Christ va revenir sur des notions essentielles qui permettent de comprendre la véritable prière, celle qui se fait dans l’intimité de sa chambre, celle qui ne répète pas les mots, celle qui ne fait pas de bruit, celle où l’on entre en dialogue véritable avec le Père. On connaît tous le Notre Père. Beaucoup le récitent par automatisme sans comprendre sa portée spirituelle. Il est temps non plus de réciter le Notre Père, mais de déclamer cette prière avec le cœur dans l’attitude et l’état d’esprit qui plaît à Dieu.
Après avoir enseigné la prière modèle, que l’on peut à présent appeler « Mon Père », Jésus-Christ, dans les versets 14 et 15 de notre étude, enchaîne sur une série de conseils, dont le premier concerne le pardon. Jésus-Christ revient sur cette notion du pardon de Dieu pour replacer le pardon dans la relation avec l’autre.
Rappelons que Matthieu adresse son évangile à des croyants qui connaissent les coutumes juives, et que son but est de montrer que Jésus est le Christ, le Messie annoncé par les prophéties. Il est certainement l’évangéliste qui fait le mieux comprendre que le Nouveau Testament est éclairé par l’Ancien Testament, lequel ne se comprend qu’à la lumière du Nouveau Testament.
¹⁴Si vous pardonnez aux hommes leurs offenses, votre Père céleste vous pardonnera aussi ; ¹⁵mais si vous ne pardonnez pas aux hommes, votre Père ne vous pardonnera pas non plus vos offenses.
Matthieu 6:14-15, Traduction Louis Segond
Lorsqu’on lit ces deux versets, encore une fois, la traduction inverse les choses et donne l’impression que c’est l’homme qui a une influence sur Dieu, que Dieu ne peut pas pardonner tant que l’homme n’a pas pardonné, et que donc Dieu serait obligé d’attendre sur l’homme pour agir. Ainsi, la traduction fait croire que l’homme aurait une certaine autorité sur Dieu. Or, et on le verra, c’est tout l’inverse.
Nous avions vu, lors de l’étude 39, au verset 12 du chapitre 6 de l’Évangile de Matthieu, que la traduction de la prière modèle donnée par Jésus-Christ induisait en erreur et faisait croire que Dieu attend que l’on pardonne pour qu’Il puisse à son tour nous pardonner. Et nous avions remis les choses en ordre, en expliquant et démontrant, en nous appuyant sur le texte original en grec ancien, que parce que Dieu nous a pardonné, alors Il nous a donné la faculté de pardonner à notre tour à ceux qui nous ont fait du mal. C’est parce que Dieu nous a pardonné en premier nos fautes, donc le mal que l’on a fait à Dieu par nos péchés, que nous sommes en capacité d’agir de même avec ceux qui nous ont fait du tort.

Le verbe ἀφίημι – aphiemi signifie laisser aller, jeter au loin, laisser se répandre, laisser se perdre, abandonner, renoncer.
Ainsi, Dieu nous pardonne, c’est-à-dire qu’il laisse aller, qu’Il jette au loin, qu’Il laisse se perdre, qu’Il renonce… à nos offenses, à nos dettes, et nous, on doit faire la même chose pour ceux qui nous offense, on doit jeter au loin l’offense, on doit se laisser se répandre l’offense, on doit renoncer à l’offense, donc renoncer à rendre l’offense.

Donc, dans ce mot παράπτωμα – paraptoma on a l’idée de se tromper, l’idée de glisser de côté, de dévier du droit chemin, de se détourner, de faire une erreur et d’être en errance.
Ainsi, Dieu nous pardonne nos fautes, nos erreurs de jugement qui nous ont fait dévier du droit chemin, nos moments d’errance et d’éloignement. Ce qui permet de remettre les compteurs à zéro et de se rétablir sur le bon chemin. C’est une grande grâce. Le pardon de Dieu est une grande grâce offerte à tous ceux qui se repentent, c’est-à-dire tous ceux qui acceptent le fait qu’ils se sont trompés et qui souhaitent revenir sur le bon chemin. Par le pardon, Dieu efface notre dette, Il jette derrière Lui nos manquements, nos mauvaises paroles, toutes les fois où l’on s’est éloigné de Lui, toutes les fois où l’on s’est opposé à Lui, afin que l’on puisse continuer le chemin le cœur léger. Dieu n’en tient plus compte, Il ne tient plus compte de notre ancien état de pécheur, et donc, par la repentance, nous devenons de nouvelles créatures.
Cependant, c’est parce que Dieu nous a pardonné qu’Il nous a rendus capables de pardonner à notre tour. Dieu nous a allégés de nos mauvaises pensées, Il nous a lavés de nos erreurs, Il a pris sur Lui toutes nos errances, et en faisant cela, Il a anéanti le mal que l’on a fait, la vibration du mal que l’on avait engendré par nos erreurs. Et parce que le mal a été anéanti par le pardon, alors nous devenons capables de faire la même chose pour ceux qui nous ont fait du mal. En pardonnant, c’est-à-dire en jetant au loin l’offense subie, l’erreur de l’autre, la faute commise par l’autre, on s’en détache, on n’en tient plus compte, ce qui permet de casser le lien et de se libérer du mal commis par l’autre.
Littéralement, ces deux versets devraient se lire ainsi : « Votre Père céleste vous pardonnera vos offenses, ainsi, vous aussi vous pourrez pardonner les offenses des hommes. Mais Dieu ne vous pardonnera pas vos offenses si vous, alors que vous avez la capacité de le faire, vous ne pardonnez pas aux hommes leurs offenses. »
Pour comprendre le sens de ces deux versets, on va se référer à la parabole de la dette :
²³C’est pourquoi, le royaume des cieux est semblable à un roi qui voulut faire rendre compte à ses serviteurs. ²⁴Quand il se mit à compter, on lui en amena un qui devait dix mille talents. ²⁵Comme il n’avait pas de quoi payer, son maître ordonna qu’il fût vendu, lui, sa femme, ses enfants, et tout ce qu’il avait, et que la dette fût acquittée. ²⁶Le serviteur, se jetant à terre, se prosterna devant lui, et dit : Seigneur, aie patience envers moi, et je te paierai tout. ²⁷Ému de compassion, le maître de ce serviteur le laissa aller, et lui remit la dette.
²⁸Après qu’il fut sorti, ce serviteur rencontra un de ses compagnons qui lui devait cent deniers. Il le saisit et l’étranglait, en disant : Paie ce que tu me dois. ²⁹Son compagnon, se jetant à terre, le suppliait, disant : Aie patience envers moi, et je te paierai. ³⁰Mais l’autre ne voulut pas, et il alla le jeter en prison, jusqu’à ce qu’il eût payé ce qu’il devait.
³¹Ses compagnons, ayant vu ce qui était arrivé, furent profondément attristés, et ils allèrent raconter à leur maître tout ce qui s’était passé. ³²Alors le maître fit appeler ce serviteur, et lui dit : Méchant serviteur, je t’avais remis en entier ta dette, parce que tu m’en avais supplié ; ³³ne devais-tu pas aussi avoir pitié de ton compagnon, comme j’ai eu pitié de toi ? ³⁴Et son maître, irrité, le livra aux bourreaux, jusqu’à ce qu’il eût payé tout ce qu’il devait.
³⁵C’est ainsi que mon Père céleste vous traitera, si chacun de vous ne pardonne à son frère de tout son cœur.
Matthieu 18:23-35, Traduction Louis Segond
Dans cette parabole, on a bien compris que le roi c’est Dieu. Se présente devant Dieu un homme qui a une dette de 10 000 talents, donc une dette colossale. Une vie entière de labeur ne suffirait pas à rembourser une telle dette. Et pourtant, cet homme, qui sait qu’il lui sera impossible de rembourser sa dette, implore le roi et promet de tout lui payer. Le roi est ému de compassion et lui remet sa dette, c’est-à-dire qu’il l’acquitte complètement. L’homme ne lui doit plus rien.
Plus tard, ce même homme rencontre quelqu’un qui lui doit 100 deniers, une misère par rapport à ce qu’il devait au roi. Et malgré les supplications de ce dernier, l’homme ne lui remet pas sa dette, et pire, le fait jeter en prison. Alors, le roi, à qui l’on vient rapporter toute l’affaire, le livre aux bourreaux.
Cette parabole montre, tout d’abord, que la dette que nous avons envers Dieu est colossale, et que jamais on n’en pourra payer le prix. C’est Jésus-Christ qui a payé la dette pour nous, et nous permet de nous en acquitter.
Dieu remet la dette à celui qui en fait la demande. Il faut demander à Dieu le pardon pour toutes nos erreurs, pour toutes nos mauvaises pensées, pour notre mauvais état d’esprit, et Dieu nous remet notre dette, c’est-à-dire que c’est terminé, Il efface l’ardoise. Mais Il attend de nous que nous fassions la même chose avec les autres.
Ainsi, cet homme a vu sa dette colossale effacée, et lorsque cet homme s’est présenté devant lui avec une toute petite dette, il ne lui a pas remis.
Aucun homme ne peut faire autant de mal à autre homme qu’il en fait à Dieu. Ainsi, si Dieu nous pardonne, alors qu’on Lui a fait tellement de mal qu’aucun homme ne pourrait le supporter, à moi de pardonner à celui qui ne m’a fait le tiers du quart de ce j’ai fait à Dieu. Notons qu’à aucun moment le roi, donc Dieu, ne demande à cet homme de rembourser sa dette. Dieu a remis la dette et Il ne revient jamais sur ce qu’il a fait. Mais, Il attend de nous que l’on fasse la même chose pour les autres. Ainsi, cet homme qui a vu sa dette de 10 000 talents remise devait remettre la dette de 100 deniers de son compagnon, il devait agir avec son compagnon comme Dieu avait agi avec lui. Et comme il ne l’a pas fait, alors il est livré aux bourreaux, c’est-à-dire à son propre mal.
Cette parabole sera étudiée plus en profondeur lorsque l’on abordera le chapitre 18 de l’Évangile de Matthieu. Ce qu’il faut en retenir c’est que lorsque l’on demande la repentance à Dieu, et que Dieu y consent, parce que Dieu a effacé notre dette envers Lui, Il attend de nous que nous fassions la même chose pour les autres.
Dans la prochaine étude, Jésus-Christ explique la notion du jeûne, élève cette notion à sa dimension spirituelle, et encore une fois, on verra que la définition même du jeûne selon la Parole de Dieu est très différente de la définition du monde.
Que Dieu vous garde et vous protège.

