L’évangile de Matthieu
Réconciliation – Matthieu 5:23-24
Le chapitre 5 de l’Évangile de Matthieu s’ouvre sur le discours sur la montagne, les béatitudes, que nous avons vu lors de l’étude 21 et dans la continuité de son discours, Jésus-Christ va opérer une réforme de la loi morale établie par l’homme pour en ressortir uniquement la Vérité, c’est-à-dire pour l’épurer de la tradition. Petit à petit, Jésus-Christ va détruire le venin du mensonge de la loi morale humaine par la Vérité de Dieu, et cela va concerner toutes les instances de nos vies.
Ainsi, Jésus-Christ va revenir sur les cinq dernières paroles des dix commandements, la Loi de Moïse, afin de recentrer la relation à l’autre en Dieu, cette relation à l’autre qui fait défaut aux scribes et aux pharisiens. Et alors, la loi devient une loi d’Amour. Dans cette étude, on va définir, selon la Parole de Dieu, ce qu’est la réconciliation.
Rappelons que Matthieu adresse son évangile à des croyants qui connaissent les coutumes juives, et que son but est de montrer que Jésus est le Christ, le Messie annoncé par les prophéties. Il est certainement l’évangéliste qui fait le mieux comprendre que le Nouveau Testament est éclairé par l’Ancien Testament, lequel ne se comprend qu’à la lumière du Nouveau Testament.
²³Si donc tu présentes ton offrande à l’autel, et que là tu te souviennes que ton frère a quelque chose contre toi, ²⁴laisse là ton offrande devant l’autel, et va d’abord te réconcilier avec ton frère ; puis, viens présenter ton offrande.
Matthieu 5:23-24, Traduction Louis Segond
Dans ces deux versets, il y a deux choses que l’on doit comprendre : ce qu’est une offrande, et ce qu’est la véritable réconciliation.
Que signifie présenter son offrande ? Et pourquoi est-il plus important de se réconcilier avec son frère que de présenter son offrande ?
Et l’on verra que tout est une question de discernement, d’écoute. Qui préfère-t-on écouter ? Dieu ou son ego qui nous pousse continuellement à ne pas reconnaître nos fautes ? L’ego qui nous place toujours en victime et nous fait chercher des excuses pour expliquer notre mauvais comportement ? C’est toujours la faute de l’autre, jamais la mienne, voilà comment nous pousse à réfléchir l’ego. L’ego nous pousse à l’individualité. Et Jésus-Christ nous demande de faire taire l’ego, car tant qu’on le laisse parler, tant qu’on ne rectifie pas nos pensées, il est inutile de présenter son offrande à Dieu. Voyons tout cela en détail.
Celui qui aime Dieu, veut marcher avec Dieu. Et dans sa marche avec Dieu, il souhaite de tout son cœur être bien équipé, par Dieu, pour travailler avec Dieu. Et souvent, beaucoup oublient qu’ils travaillent avec Dieu et aussi pour Dieu. Les pharisiens, par exemple, pensaient travailler avec Dieu, ils pensaient que Dieu les avait équipés de l’esprit d’intelligence pour gérer, à la place de Dieu, le peuple. Et dans leurs pensées, ils avaient oublié que tout devait être fait pour la gloire de Dieu et non pour sa propre gloire. Ils pensaient servir Dieu, mais en réalité, ils servaient leur ego. Ainsi, les pharisiens, ainsi que les docteurs de la loi et les sadducéens, et nombreux à leur suite, étaient plus dans l’action de faire que dans l’Action de grâce. Ils étaient les premiers à courir pour accomplir les rituels d’offrandes, afin de se faire voir, afin de se donner bonne conscience. Ils étaient dans l’action, car ils voulaient faire quelque chose pour Dieu.
Or Dieu ne nous demande pas de faire, Il nous demande d’être. Être avec Lui. Et tout notre travail consiste à rectifier nos pensées, c’est-à-dire à faire taire l’ego, afin d’être guidé seulement par l’Esprit de Dieu. Et alors, Dieu nous mènera là où Il veut nous mener afin qu’on lui soit utile. Le travail que Dieu nous demande d’accomplir est un travail spirituel, et non d’action, c’est-à-dire de mettre en place des rituels, des offrandes, ou même des sacrifices.
Dieu veut que l’on soit l’être qu’Il a créé à son image et à sa ressemblance. Et il est là tout le travail qu’Il nous demande d’accomplir, celui de revenir à la créature créée à son image et à sa ressemblance. Dieu nous aime pour ce que nous sommes, et non pour ce que nous allons faire ou pouvons faire ou projetons de faire.
Et donc, ce travail que Dieu nous demande d’accomplir est un travail spirituel assidu et prolongé, qui demande de la persévérance. C’est quelque chose de continuel qui doit s’accomplir dans toutes les instances de notre vie, qui couvre toute notre existence. C’est un travail de longue haleine qui se fait avec Dieu et pour Dieu, et petit à petit, Dieu va nous éclairer, va nous faire lâcher des choses, va transformer nos pensées. On ne pensera plus de la même façon, on deviendra, aux yeux du monde, une autre personne. Ce travail là est vu comme de la folie par ceux qui sont du monde, et parfois ce travail est douloureux, car Dieu va nous faire lâcher de nombreuses choses, et nous éloigner des proches.
Au temps de Jésus-Christ, l’offrande était une pratique régulière. Elle est encore aujourd’hui, et le croyant, qui va dans son église, pense qu’il sera bien « vu » de Dieu s’il donne à la quête, ou s’il donne du temps à son église, s’il vient y prier le dimanche. Le croyant qui aime Dieu est pressé d’offrir ses services à Dieu. Et qu’offre-t-il ? Son temps, son énergie, sa force. Il veut faire bouger les choses, il est le premier à venir à la messe, il est impliqué dans les manifestations, il est empressé de faire la lecture le dimanche, ou de s’inscrire à la chorale. Il offre aussi son savoir-faire, il veut s’impliquer dans la bonne marche de la communauté. Il veut faire plein de choses, comme donner des cours de catéchisme, distribuer des tracts, être bénévole pour une association chrétienne, participer aux cérémonies ou aux processions… Il offre aussi son argent, il fait des dons à différentes associations.
Et il y a aussi celui qui va offrir à Dieu ses renoncements, par exemple, son renoncement au tabagisme, en se disant, j’arrête la cigarette pour Dieu ou son renoncement à la pornographie.
Est-ce juste ou pas, cela n’est pas la question. D’autant plus qu’il faut des personnes qui s’impliquent dans les associations, des personnes qui font bouger les choses… mais beaucoup pensent que faire cela c’est être quelqu’un de bien aux yeux des autres.
Or, Dieu nous demande autre chose que l’offrande, puisqu’Il nous donne d’abord d’aller nous réconcilier avec son frère. Ainsi, le militantisme, l’action, le vouloir faire… tout cela est creux et vide si l’on ne s’est pas réconcilié avec son frère.
Et le fait d’aller se réconcilier avec son frère est un acte spirituel qui demande un véritable abandon à soi-même.
Ce verbe est un hapax, c’est-à-dire qu’il apparaît uniquement dans ce texte.
Le verbe διαλλάσσω – diallasso est composé de :
→ la préposition διά – dia qui se traduit par à travers ou en,
→ le verbe ἀλλάσσω – allasso qui signifie changer, échanger une chose pour une autre, transformer.
Ainsi, on a l’idée d’un changement à travers ou en Dieu, d’échanger une chose pour une autre à travers ou en Dieu, d’être transformé à travers ou en Dieu.
Et ce verbe ἀλλάσσω – allasso découle de la racine primaire ἄλλος – allos qui est un adjectif qui signifie un autre.
Ainsi, Dieu nous demande d’être un autre, de changer à travers Lui et en Lui.
Et en effet, pour se réconcilier avec son frère, il faut changer son état d’esprit, car il faut s’humilier devant lui. Et cela ne peut se faire qu’avec l’aide de l’Esprit Saint, d’où la conjugaison à l’aoriste.
Il est difficile de reconnaître ses péchés devant Dieu, car il faut admettre que l’on est pécheur. Ce travail se fait devant Dieu, et l’on sait que Dieu sonde nos cœurs et nos reins, donc, il est inutile de chercher des excuses à notre comportement. Cependant, la réconciliation se fait devant une tierce personne, sous le regard de Dieu. Et s’humilier devant quelqu’un est encore plus difficile, car il faut se débarrasser de son amour-propre, abandonner son amour-propre. Et c’est cela que Dieu nous demande d’accomplir, avec son aide.
Lorsque l’on demande à Dieu de nous pardonner nos péchés, on verbalise nos péchés, et il n’y a que Dieu qui écoute. C’est pour cela que l’on peut se mettre à nu et c’est pour cela que la véritable repentance se fait devant Dieu, sans intermédiaire. C’est autre chose que de se mettre à nu devant une personne qui peut se moquer de nous, qui peut nous rabrouer. C’est autre chose que de reconnaître que l’on a mal agi, que l’on a fait du mal à quelqu’un. Demander le pardon à son frère c’est reconnaître qu’on a mal agi envers lui, et nous avons vu ce que signifiait le frère lors de l’étude précédente.
Et Jésus nous demande d’aller confesser nos péchés à celui à qui l’on a fait du mal, d’aller voir la personne avec qui l’on a été malhonnête, la personne que l’on a blessée, et de lui demander le pardon. Ainsi, Dieu nous demande de déposer tout ce que l’on veut faire pour servir Dieu, et d’aller d’abord demander le pardon à la personne à qui l’on a fait du mal, afin que cette personne puisse pardonner et se libérer de sa souffrance. En effet, on ne peut pas pardonner à quelqu’un si ce quelqu’un ne nous demande pas de lui pardonner. Donc, Dieu nous demande de donner la possibilité à l’autre de pardonner en lui demander de nous pardonner. Dieu nous demande de réparer le plus possible les conséquences de nos fautes. Et pour cela, il faut faire tomber notre ego, notre forteresse de l’égoïsme afin de changer notre état d’esprit, avec l’aide de Dieu.
Ainsi, qu’est-ce qui s’oppose à cette réconciliation ? Notre individualité, cette individualité qui veut que l’on soit dépendant de Dieu, qui s’oppose à la charité, et qui nous pousse à nous affirmer en tant qu’individus qui évoluent pour lui-même, et non pour la grâce de Dieu. Et cette constante affirmation de soi-même s’oppose à notre vie spirituelle. Elle nous mène au paraître, au fait que de croire que nous menons une existence par rapport au regard de l’autre, comme le faisaient les pharisiens qui se montraient et qui pensaient que leur statut, représenté par leurs vêtements riches et leur fausse piété, était leur existence, qu’ils devaient préserver ce statut pour se sentir vivants.
L’individualité nous fait penser que le paraître est celui que nous sommes, alors que le paraître, c’est justement de ne pas être. L’individualité nous fait mener une existence dans le mensonge, une existence de celui qui joue un rôle pour paraître quelqu’un aux yeux des autres, mais qui n’est jamais lui-même. C’est comme porter un masque en permanence, et ce masque peut revêtir plusieurs aspects : le maquillage, les beaux vêtements, les vêtements chers, les accessoires à la mode, la belle voiture… L’individualité fait croire que tout doit être fait pour sa propre gloire, qu’il faut se montrer, avoir un public, pour se sentir vivant, pour se sentir glorieux. Et en ce sens, les réseaux sociaux alimentent l’individualité puisqu’ils poussent l’individu à rechercher la gloire, c’est-à-dire des abonnés, des fans… Ainsi, chacun est à la recherche de son moment de gloire, de la vidéo qui va apporter le plus grand nombre de vue, du post qui va apporter le plus nombre de mentions j’aime ou de commentaires. Et dans ce domaine, tout est bon pour faire le buzz, même des contenus immoraux et amoraux.
L’individualité nous fait vivre dans un mensonge par le déguisement et le truchement de nous-mêmes et la recherche de sa propre gloire. Or, il faut bien comprendre que tout doit être fait pour la gloire de Dieu et que c’est à Dieu seul qu’il faut plaire.
Comprenez et retenez que Dieu a créé l’homme pour sa Gloire, et l’individualité fait oublier à l’homme cette Vérité. Si l’on comprend que Dieu a créé l’homme pour sa Gloire, alors on s’humilie devant Dieu et l’on recherchera uniquement la Gloire de Dieu et non sa propre gloire. Et à ce moment-là, le masque tombera et l’on ne sera plus dans le paraître, mais dans l’être. Dieu veut nous unir à Lui, mais tant que l’on ne fait pas tomber le masque, tant que l’on s’accroche inutilement à son individualité, tant que l’on ne s’en remet pas entièrement à Lui, Il ne le peut pas, car c’est volontairement que l’on doit faire le choix de devenir l’être que Dieu a créé à son image et à sa ressemblance. Et pour cela, il faut renoncer à son individualité, à son ego, et donc, renoncer au vieil homme, à sa nature humaine. Ainsi, l’individualité se brise, afin que se développe et s’épanouisse la personnalité, ce que nous sommes en réalité.
Ainsi, je vous laisse méditer sur ces deux Paroles de Notre Seigneur Jésus-Christ :
Matthieu 16:24 : « Si quelqu’un veut venir après moi, qu’il renonce à lui-même. »
Luc 12:57-59 : « Et pourquoi ne discernez-vous pas de vous-mêmes ce qui est juste ? Lorsque tu vas avec ton adversaire devant le magistrat, tâche en chemin de te dégager de lui, de peur qu’il ne te traîne devant le juge, que le juge ne te livre à l’officier de justice, et que celui-ci ne te mette en prison. Je te le dis, tu ne sortiras pas de là que tu n’aies payé jusqu’à la dernière pite. »
Psaume 51:17 : « Les sacrifices qui sont agréables à Dieu, c’est un esprit brisé : ô Dieu ! Tu ne dédaignes pas un cœur brisé et contrit. »
Soyez bénis
Pour écouter la vidéo de cette étude